top of page
Rechercher
  • Vincent Dubé

RÉFORME EN VUE DANS LES RÉGIMES ET LES MANDATS DE PROTECTION

En juin dernier, l’Assemblée nationale a adopté le projet de loi n°18, devenant ainsi la Loi modifiant le Code civil, le Code de procédure civile, la Loi sur le curateur public et diverses dispositions en matière de protection des personnes. Devant entrer en vigueur au plus tard en juin 2022, cette loi vise à réformer les régimes de protection actuellement en place, ainsi qu’à actualiser les règles encadrant les mandats de protection.


Bref aperçu des changements et nouveautés


L’un des principaux objets de la loi est d’abroger les régimes de conseiller et de curatelle au majeur présentement prévus au Code civil, afin de ne conserver que la tutelle. Or, cette dernière sera modulée en fonction des besoins et des capacités du majeur inapte protégé. En effet, le tribunal, au moment de prononcer l’ouverture de la tutelle, devra tenir compte des facultés et, dans la mesure du possible, de l’avis de la personne inapte afin d’en déterminer les modalités[1]. Concrètement, la tutelle modulée vise donc à permettre au majeur protégé, si ses capacités lui permettent, de continuer à exercer certains actes juridiques. Les autres actes seront réalisés par le tuteur, dans l’intérêt du majeur protégé.


Également, la loi prévoit de nouvelles mesures afin d’encadrer les mandats de protection. Rappelons que contrairement aux régimes de protection, les mandats sont réalisés alors que le majeur est apte, en prévision de l’inaptitude. Parmi les nouveautés, notons la reddition de compte obligatoire. Le mandataire devra ainsi, dans un intervalle ne pouvant excéder 3 ans, rendre compte de ses agissements et de sa gestion des biens à une personne désignée par la tutelle[2]. De plus, un inventaire des biens du majeur protégé devra obligatoirement être fait dans les 60 jours suivant l’homologation du mandat par le tribunal[3].


Autre nouveauté majeure, une mesure d’assistance au majeur est prévue. Ceci permettra au majeur qui est toujours apte, mais qui a néanmoins besoin d’être assisté dans l’exercice de certains droits civils ou dans l’administration de son patrimoine (pensons à la personne âgée), de nommer jusqu’à deux assistants[4]. L’assistant agira en tant qu’intermédiaire entre le majeur assisté et le tiers, sans toutefois pouvoir prendre de décisions à sa place. Son rôle étant strictement d’accompagner et de conseiller. Conséquemment, le majeur assisté conserve sa pleine capacité d’exercice de ses droits juridiques et ne devient donc pas « juridiquement incapable »[5]. L’assistant est nommé par le majeur assisté et approuvé par le directeur de la protection des personnes vulnérables (ancien curateur public).


Le notaire : le professionnel tout désigné

Ces nouveautés auront très certainement une incidence dans la pratique du notaire puisque celui-ci demeure le juriste tout désigné en matière de régimes et de mandats de protection. La vaste expertise du notaire procure au mandat d’inaptitude qu’il réalise un caractère authentique et conforme aux volontés du mandant. Ainsi, bien que le mandat n’ait pas obligatoirement à être notarié, 87% des Québécois en possédant un ont préféré le faire[6]. Il n’est donc guère surprenant de constater que la Chambre des notaires se soit vivement intéressée à la réforme des régimes et des mandats de protection. Dans son mémoire portant sur le projet de loi, la Chambre a salué la loi dans son ensemble, en soulignant les « actions concrètes qui vont dans le sens d’un plus grand respect de l’autonomie résiduelle du majeur.[7]» Elle y est cependant allée de quelques recommandations afin d’assurer une plus vaste protection des personnes vulnérables. Entre autres, elle recommande de permettre aux notaires de réaliser la procédure de nomination de l’assistant, ce qui n’est pas prévu dans la loi puisqu’il suffit d’obtenir l’approbation du directeur de la protection des personnes vulnérables[8].

En conclusion, la nouvelle loi constitue une véritable petite révolution en matière de protection des personnes vulnérables. Conséquemment, il va sans dire que le notaire sera appelé à prendre connaissance de ces modifications, celui-ci demeurant toujours le professionnel désigné afin de guider et de protéger juridiquement les personnes en position de vulnérabilité.



Par Vincent Dubé


[1] Loi modifiant le Code civil, le Code de procédure civile, la Loi sur le curateur public et diverses dispositions en matière de protection des personnes, L.Q. 2020, c. 11, art. 50. (ci-après Loi sur les régimes et mandats de protection). [2] Id., art. 83. [3] Id., art. 84. [4] Id., art. 58 [5] MORIN. Christine, « L’adoption du projet de loi 18: un début de bonne nouvelle, notamment pour les proches aidants », dans La Tribune, 4 juin 2020, https://www.latribune.ca/opinions/ladoption-du-projet-de-loi-18-un-debut-de-bonne-nouvelle-notamment-pour-les-proches-aidants-1982255489c9f4527dffb98a94728aff (consulté le 16 janvier 2021). [6] Segma Recherche, (2018), Sondage sur la notoriété du mandat de protection – Curateur public du Québec, https://www.curateur.gouv.qc.ca/cura/publications/sond_notor_mandat_201803.pdf (consulté le 17 janvier 2021). [7] CHAMBRE DES NOTAIRES DU QUÉBEC, Mémoire sur le projet de loi n°18, en ligne : https://www.cnq.org/wp-content/uploads/2020/10/228_fr_v_memoire-projet-de-loi-n18.pdf, p.59. [8] Id., p.27



8 vues0 commentaire
bottom of page